Un week-end bien chargé

Contre Inarkiev…

C’était la reprise de la Bundesliga le week-end dernier, le fameux championnat d’Allemagne par équipes étalé sur sept week-ends dans la saison. Une reprise programmée un 21 octobre… C’est-à-dire exactement un mois après la terrible séance de départages contre Aronian en demi-finale de la Coupe du Monde, et précisément le jour de mon 27e anniversaire. Autant dire qu’en prenant le train pour Baden-Baden ce vendredi matin, mes sentiments étaient mitigés. Fallait-il y lire le bon, ou le mauvais présage ?

L’impressionnante armada de Baden-Baden… même pas au complet !
L’impressionnante armada de Baden-Baden… même pas au complet !

Apparié contre le Russe Inarkiev avec les noirs dans le premier match face à la forte équipe de Schwabisch Hall, j’ai joué une ligne de la Najdorf que je n’avais pas revue récemment, et qui comporte une part de risque. J’ai donc dû improviser un petit peu !

Une conclusion pas assez clinique

Heureusement, il n’a pas très bien réagi, et a même dépensé près de 57 minutes pour jouer 22.Dc1, qui ne sera pourtant pas le coup de l’année ! (voir diagramme)

Du coup, j’ai pu intercaler 22…Tc8 sans lui laisser le temps pour g5, et la situation s’est rapidement dégradée pour lui face à mon jeu à l’aile-Dame. En gros manque de temps, il a commis l’erreur décisive avec 32.Db3+?, alors que seul 32.Dc2 pouvait résister encore, même si son Cb6 enfermé n’incite pas à l’optimisme. Plutôt que se résigner à une finale sans espoir après 33.Dxb4, Inarkiev a choisi de me laisser pénétrer Dame et Tour sur la première rangée, pour une attaque décisive. Si le gain n’a jamais été remis en question par la suite, disons que j’aurais pu finir la partie de manière plus « clinique », tout d’abord avec la ligne forcée 37…bxc4+! 38.Dxc4 De3+ 39.Dc3 Dxc3+ 40.bxc3 gxf3 41.Fg2 Txh1 42.Fxh1 f2 43.Fg2 Cd5! (la finesse que j’avais oubliée et qui lève toute ambiguïté). A la place, j’ai choisi 37…gxf3, qui laisse 38.Dh2. Même si ça reste gagnant, sur l’échiquier, c’est un peu désagréable de devoir calculer des lignes chaotiques, alors qu’on avait l’impression de pouvoir simplement promouvoir le pion g. Par exemple, si je joue 53…Dg3 au lieu de 53…Dc1, ce qui était ma première idée, les blancs ont 54.De3 et si je fais une deuxième Dame, les blancs ont un joli perpétuel après 54.De7+!.

D’une manière générale, il n’est jamais si facile de se remobiliser quand votre adversaire se met à résister opiniâtrement dans une position désespérée, alors qu’il n’avait pas fait preuve de ces ressources dans le milieu de jeu.

Interview après la victoire contre Inarkiev
Interview après la victoire contre Inarkiev

Au final, c’était une assez bonne partie, dans le milieu de jeu de laquelle j’ai trouvé de bons coups. J’aurais simplement dû laisser encore moins de chances à mon adversaire.

Réveillé à 5h30

Le lendemain, je me suis heurté à la difficile problématique des parties de 10h du matin ! Je me suis réveillé trop tôt, puis trop tard… Après Inarkiev, j’étais bien fatigué, et je me suis endormi assez tôt (pour mes standards !). Du coup, réveillé d’abord à 5h30, puis recouché, mais sans avoir pris le temps de me préparer pour Peter Leko, que j’ai retrouvé face à moi à 10h. Je me suis rapidement planté dans l’ouverture, et pour couronner le tout, j’ai choisi le mauvais 19.Te4? (voir diagramme), oubliant qu’après 19…g5, je ne pouvais pas jouer 20.Chf5 à cause de 20…Fg6 qui laisse mes pièces dans une situation délicate.


Du coup, j’ai dû revenir 20.Cf3, et Peter a eu l’occasion de prendre l’avantage de deux façons par 20…f5! 21.Txe5, et soit il prend la qualité par 21…Cxe5, soit il prend la pièce pour 3 pions par 21…g4 22.Txf5 Txf5 23.Cxf5 gxf3. Ensuite, je crois qu’il pouvait également conserver l’avantage avec 23…Dxd1+ (au lieu de 23…Cxe6) 24.Txd1 Ff7! 25.Cc5 b6.
Une partie à oublier, dans laquelle je me suis retrouvé tout de suite moins bien avec les blancs ; finalement, je m’en sors plutôt pas mal !
L’essentiel reste que notre remarquable formation de Baden-Baden, qui n’avait même pas aligné son équipe-type (Aronian et Caruana étaient absents !), a commencé la saison comme elle avait terminé la précédente… par deux victoires !

[otw_shortcode_quote border=”bordered” border_style=”bordered” background_pattern=”otw-pattern-1″]Long train runninghttps://www.youtube.com/watch?v=tnD0eVdHJfI
A force de m’y rendre depuis plusieurs années, je commence à bien connaître la ville de Baden-Baden. Etienne Bacrot encore mieux, puisqu’il joue pour le club depuis 12 ans ! Nous avons également l’habitude de faire ensemble le trajet depuis Paris. C’est pourtant ensemble que nous avons réussi l’exploit de nous tromper de train au changement à Karlsruhe, prenant un direct pour Offenburg. C’est un aimable contrôleur allemand qui nous en a avisés, sans nous punir pour autant, qu’il en soit ici remercié ! Une perte de temps finalement sans grande conséquence, puisque la première partie était programmée le lendemain, et qui ne nous a même pas empêchés d’être à l’heure pour le rendez-vous avec l’équipe avant le dîner…[/otw_shortcode_quote]

Site de la schachbundesliga : http://schachbundesliga.de

Les parties de Maxime dans la schachbundesliga :

Les tops de Maxime

Les tops de Maxime Vachier-Lagrave

Dans son livre « Joueur d’Echecs », Maxime se livre et dévoile certains de ses goûts. Avant la préparation pour les échéances décisives de Palma de Majorque puis du Grand Chess Tour à Londres, Maxime a bien voulu partager quelques petits secrets avec les fidèles de son site.
Voici donc le podium de MVL sur certains sujets, importants ou futiles, à vous de juger…

Musique

Séries

Sportifs

Clubs de football

Jeux

Pays

Hôtels

Restaurants

Plats

Boissons

Matières scolaires

« Joueur d’échecs » dans les médias

Mvl face à Yann Barthès dans l’émission « Quotidien » du 5 octobre (photo Pauline F)

« Joueur d’Echecs » est paru il y a maintenant presque une semaine. Maxime profite du mois et demi de liberté qui le sépare du tournoi décisif à Palma de Majorque pour reprendre l’entraînement, mais aussi pour faire la promotion de ce premier ouvrage.

Une campagne qui a d’ailleurs démarré sur les chapeaux de roue, avec dès le jeudi 5 octobre, une invitation sur le prestigieux plateau de « Quotidien », le talk-show vedette d’avant-soirée animé par Yann Barthès. Pendant 11 minutes, dans une émission régulièrement suivie par plus d’1 million de téléspectateurs, Maxime a pu faire découvrir au grand public ce qu’est le jeu d’échecs de haut niveau, et parler également de son livre.

En coulisses, juste avant le passage en plateau… (photo Pauline F)
En coulisses, juste avant le passage en plateau… (photo Pauline F)

Retrouvez le passage de Maxime dans l’émission sur le site de l’émission “Quotidien”.

Le lendemain paraissaient dans « Le Figaro Magazine » les « bonnes feuilles » de « Joueur d’Echecs », en exclusivité. Sous le titre « Dans la tête d’un génie », le célèbre hebdomadaire a consacré 4 pleines pages à Maxime et à son livre, démontrant une nouvelle fois l’intérêt grandissant des medias mainstream pour le jeu d’Echecs, à travers le parcours hors norme de MVL…

MVL dans le Figaro Magazine
MVL dans le Figaro Magazine

On attend beaucoup d’autres interventions médias, mais la plupart ne sont pas encore calées précisément, à part « Le Point » du jeudi 12 octobre, qui accordera 3 pages au jeu d’Echecs en France, avec en focus un portrait de Maxime et une présentation de son livre.

[otw_shortcode_quote border=”bordered” border_style=”bordered” background_pattern=”otw-pattern-1″]You can’t judge a book by the coverhttps://www.youtube.com/watch?v=Lch0o4wwGyw&feature=youtu.be
Les Editions Fayard sont un grand nom de l’édition française, et ont l’habitude de publier des best sellers, comme le sera certainement le tout récent « Ca s’est passé comme ça » d’Hillary Clinton, sans parler des prochaines « Mémoires » de Barack et Michelle Obama, mondialement attendues !
La distribution de « Joueur d’Echecs » bénéficie donc d’un réseau très dense, avec évidemment quelques particularités locales, comme en attestent ces photos ; parfois à côté d’une star planétaire, parfois entre deux ouvrages engagés, mais toujours présent !

(photos Christophe Philippe / LV)
(photos Christophe Philippe / LV)

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“Joueur d’échecs”, mon livre chez Fayard

Joueur d'échecs, le livre de Maxime Vachier-Lagrave, édité par Fayard

Ce mercredi 4 octobre n’est pas un jour comme les autres pour moi…

En effet, c’est la date de sortie de mon autobiographie intitulée « Joueur d’échecs », qui intégrera les rayons des librairies et sera disponible sur les sites de vente en ligne.

Edité par Fayard, cet ouvrage est destiné à faire découvrir au grand public ce qu’est la vie d’un joueur d’échecs professionnel, et comment réfléchit un Grand-Maître de premier plan. Il permettra également aux passionnés de pénétrer dans les coulisses et d’apercevoir l’envers du décor. Les grands tournois, mes collègues du Top 10, les entraîneurs, les voyages, l’ordinateur, les hobbies, les amis, l’entourage, mon partenaire, l’argent, Magnus, les phases d’euphorie et de découragement…

J’aborde avec le maximum d’authenticité tous ces sujets, et bien d’autres encore !

4e de couverture du livre de MVL
4e de couverture du livre de MVL

Acheter le livre en version imprimée ou numérique : Editions Fayard

Coupe du monde : au bout du suspense !

Aronian-Mvl, un combat épique (photo site officiel)

Me voilà donc de retour à Paris après trois bonnes semaines passées en Géorgie ; une bien longue absence… Sur place, nous étions 3 français. Laurent Fressinet a été sorti au premier tour, et Etienne Bacrot au second, contre Bu, le tombeur de Carlsen. Etienne a alors immédiatement repris sa casquette d’entraîneur et il est resté à Tbilissi jusqu’au bout pour m’assister. Le format de ce tournoi est toujours original, avec le contingent de joueurs qui se réduit de moitié tous les trois jours. C’est assez rigolo de dire au revoir à tous les petits camarades qui s’en vont au fur et à mesure, et de se retrouver quasiment tout seul dans la salle en demi-finale. Evidemment, c’est un peu moins drôle quand il faut soi-même partir !

Repos et décompression au programme

Au niveau de la routine du tournoi, Etienne et moi restions la plupart du temps à l’hôtel, avec comme seul déplacement le transport vers la salle de sport, située à une centaine de mètres ! L’hôtel Hualing servait en même temps à l’hébergement des joueurs et à la compétition elle-même. Il se trouve à l’extérieur de Tbilissi, dans un quartier créé suite à un accord sino-géorgien visant à accueillir 30.000 ressortissants chinois. L’hôtel a donc été construit par une société chinoise, et comprend évidemment un restaurant chinois, de qualité d’ailleurs, ce qui permettait de changer de l’habituel buffet géorgien. Les divertissements sur place n’étaient pas très nombreux, mais il y avait quand même un bar sympathique, avec billard, fléchettes, et qui retransmettait également quelques événements sportifs.

Trois français sur les hauteurs de Tbilissi… (photo Etienne Bacrot)
Trois français sur les hauteurs de Tbilissi… (photo Etienne Bacrot)

Plus on avançait dans le tournoi, et moins je faisais de préparation spécifiquement échiquéenne, hormis les séances de pure révision des lignes théoriques. Je privilégiais le repos et la décompression, ce qui a plutôt bien marché jusqu’à la demi-finale !

Difficile pour moi de revenir à chaud sur cette fameuse demi-finale contre Aronian, et sur le déroulement de la compétition en général. Je dois dire que je n’ai sans doute pas assez de recul pour pouvoir expliquer précisément ce qui s’est passé. Mais je vais essayer quand même !

Miracle, il ne parvient pas à conclure !

Contre Aronian, la seule chose dont je suis sûr, c’est que ça jouait mal des deux côtés ! Dans les parties classiques, nous nous sommes neutralisés mutuellement. Dans la première partie de départage, d’ailleurs certainement la seule bonne partie de ce match, j’ai trouvé une idée sur la ligne de l’Espagnole avec 6.d3 que j’avais jouée en classique. Du coup, Levon s’est vite retrouvé à défendre une position passive, ce qu’il n’aime pas du tout, et j’ai su en profiter pour marquer d’entrée dans le tie-break. Malheureusement, le match retour s’est avéré catastrophique à tous points de vue ; un vrai trou noir. D’abord parce que s’est imposé à moi le sentiment que j’avais fait le plus dur, et que j’ai sans doute été victime d’un relâchement inconscient. Ensuite, il est clair que je n’aurais pas dû me retrouver dans une situation aussi précaire après une ouverture que je connaissais plutôt bien, y compris le sacrifice de pièce nouveau 15.Fc4!? et ses conséquences. Et enfin parce que j’aurais pu opposer une bien meilleure résistance plutôt que de perdre pied comme je l’ai fait.

J’ai ensuite souffert dans les parties de 10’ comme dans les blitz, mais sans jamais rompre. Evidemment, il y a eu ce blitz hallucinant dans lequel Levon, qui a les blancs, doit m’écraser très facilement, mais où, par miracle, il ne parvient pas à conclure. Je me retrouve même gagnant dans la finale de Dames, mais par manque de temps comme par manque de lucidité, j’oublie son coup 49.Df1+ qui récupère le pion b5.

J’étais passé en « mode réflexe »

Mais mon plus gros regret restera évidemment cet ultime Armaggedon dans lequel je gagne le toss et je choisis les pièces noires, avec une minute de moins mais le droit de faire nulle. Je commence bien la partie, je résous complètement mes problèmes, et je reviens même à égalité au temps. Après, c’est un peu le trou noir… Je me suis embrouillé dans les plans à partir du moment où j’ai laissé les blancs échanger les Fous en b5 puis jouer 27.Fd6!. Avant ça, je n’avais aucun doute sur le fait que j’allais au moins faire nulle. Malgré tout, la position reste quand même objectivement assez égale, mais j’ai pris la décision incroyable de jouer 40…Rc4?, alors que j’avais vu la possibilité de prendre le pion f4 avec 40…Re4!. Mais Levon à son tour rate le coche, et notamment une possibilité de conclure (47.d7!), après quoi la finale à 4 Tours est à nouveau sous contrôle. Malheureusement, je n’anticipe pas sa percée 53.f5+ suivi de 54.e6, alors que je pensais faire nulle tranquillement. Avec si peu de temps à la pendule (je rappelle qu’il n’y a pas d’incrément pendant les 60 premiers coups de l’Armageddon, et qu’on n’a aucun moyen de savoir quand on atteint cette limite !), je ne trouve pas l’ultime sauvetage 54…Taa4!, qui garantit un perpétuel ou l’échange des pions passés. Peut-être aurais-je dû prendre la moitié des 30 secondes qui me restaient, pour comprendre que 54…Ta8? perdait, et tenter 54…Taa4! à l’arrache ? Mais j’étais déjà passé en « mode réflexe » et je n’ai pas pu avoir cette lucidité-là…

La détermination de Mvl n’aura pas suffi. Photo : site officiel
La détermination de Mvl n’aura pas suffi. Photo : site officiel

Laisser Tbilissi derrière moi

Si je reviens sur l’ensemble de la compétition, je dirais que le match le plus intense, et sans doute même le meilleur match de toute la Coupe du Monde, c’est celui qui m’a opposé à Grischuk en 1/8e de finale. Je crois sincèrement que les parties rapides de ce match ont été d’un très haut niveau. Globalement sur une aussi longue période, j’ai réussi à éviter les jours catastrophiques, si l’on excepte bien sûr le tout dernier ! Alors évidemment, il y a eu des hauts, comme les rapides contre Grischuk, et aussi contre Svidler. Mais quelques bas également, notamment la deuxième partie classique contre Svidler, ainsi que le tout premier et le tout dernier jour ! On peut aussi citer les parties classiques contre Lenderman, qui n’ont pas été très clean non plus.

Mais maintenant, Tbilissi est derrière moi, et il faut se reconcentrer sur le prochain objectif, le Grand Prix FIDE, dont le dernier tournoi à Palma de Majorque débutera le 16 novembre. Je me rendrai aux Baléares avec la ferme intention d’accrocher une des deux places qualificatives pour le Tournoi des Candidats de 2018, en essayant d’oublier combien je suis passé près à Tbilissi !

[otw_shortcode_quote border=”bordered” border_style=”bordered” background_pattern=”otw-pattern-1″]Heartbreak hotelhttps://www.youtube.com/watch?v=W4euyTDhFnk
Après un tournoi éreintant en Géorgie, Maxime a jugé préférable de renoncer au super fort Open de l’Ile de Man où il était annoncé, mais qui commençait dans la foulée des demi-finales. Tant pis pour le voyage à Douglas, dans le « joyau de la Mer d’Irlande »… Wesley So a d’ailleurs fait le même choix. Les deux n’auront pas non plus eu le plaisir de troquer l’impersonnelle salle de jeu de l’Hôtel Hualing, qu’ils auront sillonnée pendant plus de trois semaines, contre le majestueux amphithéâtre de l’hôtel Biltmore, en plein centre de Tbilissi, qui accueille les 4 parties de la finale Aronian-Ding Liren.

Un splendide écrin pour la finale (photo Hôtel Biltmore Tbilissi)
Un splendide écrin pour la finale (photo Hôtel Biltmore Tbilissi)

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Site officiel : http://tbilisi2017.fide.com
Les parties de Maxime à la Coupe du Monde :

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